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"Pourquoi tant de fonctionnaires ?", Bloc-notes de L'Opinion, 4 janvier 2017

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L’étendue de la dépense publique (57 % du PIB), l’importance de la dette publique à la merci d’une hausse des taux et le programme de François Fillon ont, à juste titre, mis en débat l’importance des effectifs de fonctionnaires de notre pays.

Cette inquiétude n’est pas un phénomène nouveau, et après Alexis de Tocqueville, de manière singulière en 1852, Karl Marx écrivait dans Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte : « On se rend compte immédiatement que, dans un pays comme la France où le pouvoir exécutif dispose d’une armée de fonctionnaires de plus d’un demi-million de personnes et tient, par conséquent, constamment sous sa dépendance la plus absolue une quantité énorme d’intérêts et d’existences, où l’Etat enserre, contrôle, réglemente, surveille et tient en tutelle la société civile, depuis ses manifestations d’existence les plus vastes jusqu’à ses mouvements les plus infimes, de ses modes d’existence les plus généraux jusqu’à la vie privée des individus, où ce corps parasite, grâce à la centralisation la plus extraordinaire, acquiert une omniprésence, une omniscience, une capacité de mouvement et un ressort accru, qui n’a d’analogue que l’état de dépendance absolue, la difformité incohérente du corps social… »

Marx trouvait les 500 000 fonctionnaires excessifs pour une population de 36 millions d’habitants. Le dernier rapport annuel sur l’état de la fonction publique dénombre en 2015, pour 65 millions d’habitants, 2,385 millions de personnes dans la fonction publique d’Etat, 1,879 million dans la fonction publique territoriale, 1,153 million dans la fonction publique hospitalière. Soit un total de 5,417 millions d’agents. Ces données ne comprennent pas les effectifs des 17 formes de contrats aidés…

Face à cette situation, le discours gouvernemental tend à dissimuler ses responsabilités derrière la hausse, réelle, des effectifs de la fonction publique territoriale. Mais à qui la faute ? En 1998, il y avait trois niveaux d’administration locale : communes, départements, région. En 1999, la gauche a inventé l’intercommunalité car personne n’avait le courage d’engager la fusion des 36 000 communes de France, alors que la plupart des pays européens l’ont fait (rappelons que près de 20 000 communes ont moins de 500 habitants). En 2015, la gauche encore a rendu l’intercommunalité obligatoire et a, de plus, inventé les métropoles ; il y en a désormais 22. On est donc passé à cinq niveaux d’administration locale.

Les intercommunalités comme les métropoles ont des compétences réduites qui se superposent à celles des communes et laissent un rôle marginal aux élus du suffrage universel direct : ce sont ces niveaux d'administration qu'il faut supprimer ! Certes, de bons esprits proposent de supprimer les communes et les départements ! Ce serait à l’évidence une politique de Gribouille. D’une part, elle ferait reculer la proximité,à laquelle le public est très attaché puisque les maires sont les seuls élus dont la popularité est supérieure à 60 %. La proximité est le meilleur moyen de combattre le populisme qui risque d’emporter notre modèle de société. Ce n’est pas un hasard si les formations extrémistes ont très peu d’élus locaux et trouvent leur succès principal grâce au scrutin proportionnel qui dépersonnalise les candidats : on vote pour ou contre une idée, et non plus pour l’homme ou la femme qui l’incarne.

D’autre part, les communes comme les départements ont acquis, au fil des temps, un professionnalisme qui exige un long apprentissage et qui tient aussi à la connaissance des territoires et des personnes. La vérité est que les effectifs ont augmenté parce que des compétences de l’Etat ont été transférées, comme le RSA ou l’APA, non seulement sans être assorties des moyens correspondants mais en plus avec une réduction forte des ressources propres des collectivités. La vérité aussi est que ce sont les communes qui assurent de nouveaux services, indispensables avec les modes de vie d’aujourd’hui comme les crèches et les services périscolaires, grands responsables de la hausse des effectifs municipaux.

Quand l’Etat change, sans aucune concertation, les rythmes scolaires, cela se traduit par une augmentation des personnels ! Idem quand il impose sans cesse de nouvelles normes, de nouvelles interdictions, de nouvelles autorisations qu’il faut instruire, de nouveaux contrôles…

Pourtant, des gisements d’économies importantes sont possibles. Ainsi, il faut reconnaître que la loi du 16 mars 2015 a encouragé les fusions de communes et que les résultats sont d’ores et déjà encourageants. Les départements doivent suivre cette voie de la fusion entre eux pour réaliser des économies d’échelle sur un territoire plus pertinent. On peut également très bien mettre fin aux doublons coûteux comme celui des Caisses d’allocations familiales qui mettent en œuvre la même politique sociale que les départements, et pour lesquelles les dernières élections ont eu lieu en 1983, alors qu’elles gèrent pourtant 73 milliards chaque année…

Le ministère de l’Intérieur ne compte que 139 000 policiers pour 285 000 agents. La France est la seule démocratie à entretenir un appareil préfectoral très coûteux (près de 26 000 fonctionnaires dans les préfectures et sous-préfectures, 250 préfets pour 115 postes) et dont le principal objet est de trouver le moyen de contraindre les collectivités locales à mettre en œuvre sur le terrain les différentes mesures politiciennes du gouvernement, à commencer par les contrats aidés destinés à faire baisser les statistiques du chômage.

Non, l’Etat n’est pas le mieux placé pour faire la leçon aux collectivités territoriales, qui ont des budgets obligatoirement en équilibre, qui réalisent 70 % de l’investissement public, mais ne sont endettées qu’à hauteur de 9 % de la dette nationale ; un Etat qui, lui, laisse son patrimoine et ses infrastructures se dégrader, investit fort peu et est dangereusement endetté.

Nous avons un Etat qui multiplie les structures : l’Inspection générale des finances a dénoncé les 1244 agences, véritables démembrements des ministères, vivant dans l’autonomie et l’opacité, dotées de 46 taxes qu’elles contrôlent et payant très généreusement ses dirigeants. Les établissements publics industriels et commerciaux (Epic) et les sociétés nationales nationalisent de fait nombre d’entreprises privées en les absorbants tandis que, depuis dix ans ; il n’a été procédé à aucune privatisation.

La logique de l’Administration c’est son extension indéfinie, la métastase !

Relire l'article sur le site de L'Opinion

 


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